La problématique des « biens communs » est sans doute l’une des plus intéressantes que nous apporte la réflexion sociologique contemporaine. Mais c’est une notion dont nous sommes loin d’avoir fait le tour : car il est aussi légitime d’y inclure les ressources matérielles d’un territoire que ses particularités immatérielles résultant de son histoire, de ses pratiques culturelles, de ses enjeux patrimoniaux. Sur quoi se greffent les mille questions de propriété, de partage, de gouvernance, de main-mise indue des multinationales, de développement autonome et de rapports à l’Etat-nation.

M’appuyant sur ces réflexions préliminaires, je prends pour objet d’observation Mélagues, un village que je connais bien, situé au coeur des derniers contreforts des Cévenne. Village montagnard peuplé d’agriculteurs, il a compté deux mille habitants au XIXe siècle ; aujourd’hui, il n’en compte plus que 72. Huit exploitations agricoles se partagent quelque 2000 hectares : polyculture, élevage bovin et ovin (lait pour le Roquefort) ; la forêt occupe les 2500 hectares restants, dont 600 de bois sectionnaux, et le reste, autrefois forêts communales appartient aujourd’hui a` l’Etat, par le canal de l’office National des Forêts.